Déclaration finale du Sommet des Peuples de Rio+20 pour la Justice sociale et environnementale

23 Juil

Véritable lieu d’échanges et de foisonnement d’idées, le Sommet des Peuples de Rio a également permis l’expression de nombreuses revendications de la société civile internationale.  Découvrez la déclaration finale du Sommet des Peuples ci-dessous !

Le document final du Sommet des peuples synthétise les principaux axes discutés durant les plénières et assemblées, ainsi que l’ont exprimé les fortes mobilisations entre le 15 et le 22 juin, qui soulignent les convergences autour des causes structurelles et des fausses solutions, des solutions des peuples face aux crises, ainsi que les principaux axes de lutte pour la période à venir. Les synthèses approuvées dans les plénières intègrent et complètent ce document politique pour que les peuples, mouvements et organisations puissent continuer à converger et approfondir les luttes et la construction d’alternatives dans leurs territoires, régions et pays dans le monde entier.

Déclaration finale

Les mouvements sociaux et populaires, syndicats, peuples, organisations de la société civile et écologistes du monde entier présents au sommet des peuples de Rio+20 ont impulsé dans les campements, à travers les mobilisations massives et les débats, la construction des convergences et des alternatives, conscients que nous sommes les sujets d’une autre relation entre êtres humains et entre l’humanité et la nature, et assumant le défi urgent de stopper la nouvelle phase de recomposition du capitalisme et de construire à travers nos luttes de nouveaux paradigmes de sociétés.

Le Sommet des Peuples est le moment symbolique d’un nouveau cycle dans la trajectoire des luttes globales qui produisent de nouvelles convergences entre mouvements de femmes, indigènes, noirs, jeunes, agriculteurs et agricultrices, familles, paysans, travailleurs et travailleuses, peuples et communautés traditionnelles, quilombolas, défenseurs du droit à la ville, et religions du monde entier. Les assemblées, les mobilisations et les grandes marches des peuples ont été les moments d’expression les plus fortes de cette convergence.

Les institutions financières multilatérales, les coalitions au service du système financier comme le G8 et le G20, la capture « corporative » de l’ONU et la majorité des gouvernements ont démontré leur irresponsabilité face au futur de l’humanité et de la planète, et ont fait la promotion des intérêts des transnationales dans la conférence officielle. Au contraire la vitalité et la force des mobilisations des débats au Sommet des Peuples ont renforcé notre conviction que seul le peuple organisé et mobilisé peut libérer le monde du contrôle des transnationales et du capitalisme financier.

Il y a vingt ans, le forum global réalisé lui-aussi à l’Aterro do Flamengo, avait dénoncé les risques que courait l’humanité et la nature avec la privatisation et le néo-libéralisme. Aujourd’hui nous affirmons que, en plus de la confirmation de notre analyse, nous observons des reculs significatifs concernant les droits humains déjà reconnus. A Rio+20 le scénario voué à l’échec des fausses solutions défendues par les mêmes acteurs qui ont provoqué la crise mondiale se répète. A mesure que cette crise s’amplifie, les corporations avancent contre les droits des peuples, la démocratie et la nature, séquestrant les biens communs de l’humanité pour sauver le système économico-financier.

Les multiples voix et forces qui ont convergé au Sommet des Peuples dénoncent la vraie cause structurelle de la crise globale: le système capitaliste patriarcal, raciste et homophobe.

Les transnationales continue à commettre ses crimes en violant systématiquement les droits des peuples et de la nature dans l’impunité la plus totale. De la même façon, elles avancent leurs intérêts à travers la militarisation, la criminalisation des modes de vie des peuples et des mouvements sociaux en promouvant la déterritorialisation dans les campagnes et dans les villes.

De même nous dénonçons la dette écologique historique qui affecte majoritairement les peuples opprimés du monde, et qui doit être assumée par les pays hautement industrialisés, qui en fin de compte, sont ceux qui ont provoqué les multiples crises que nous vivons aujourd’hui.

Le capitalisme conduit aussi à la perte du contrôle social, démocratique et communautaire sur les ressources naturelles et les services stratégiques, qui continuent à être privatisés, transformant les droits en marchandises et limitant l’accès des peuples aux biens et services nécessaires à la survie.

La dite « économie verte » est une des expressions de la phase financière actuelle du capitalisme qui utilise d’anciens et de nouveaux mécanismes, comme l’augmentation de l’endettement public-privé, l’encouragement à la surconsommation, l’appropriation et la concentration des nouvelles technologies, les marchés du carbone et la biodiversité, la privatisation et l’aliénation des terres et les partenariats public-privé, parmi d’autres.

Propositions et résumés

Les alternatives se trouvent dans nos peuples, notre histoire, nos coûtumes, nos savoirs, pratiques et systèmes productifs, que nous devons entretenir, revaloriser pour passer à l’échelle d’un projet contre-hégémonique et transformateur.

La défense des espaces publics dans les villes, avec une gestion démocratique et la participation de la population, l’économie coopérative et solidaire, la souveraineté alimentaire, un nouveau paradigme de production, distribution et consommation, le changement de la matrice énergétique, sont des exemples d’alternatives réelles face à l’actuel système agro-urbano-industriel.

La défense des biens communs passe par la garantie d’un ensemble de droits humains et de la nature, par la solidarité et le respect des visions cosmiques et croyances des différents peuples, comme par exemple, la défense du « Bien Vivre » comme forme d’existence en harmonie avec la nature, ce qui présuppose une transition juste qui doit être construite avec les travailleurs et les peuples.

Nous exigeons une transition juste qui suppose une amplification du concept de travail, la reconnaissance du travail des femmes et un équilibre entre la production et la reproduction, pour que celle-ci ne soit pas une attribution exclusive des femmes. Cela passe encore par la liberté d’organisation et le droit à la négociation collective, ainsi que par la création d’un système de sécurité et de protection sociale, compris comme un droit humain, ainsi que des politiques publiques qui garantissent un travail décent.

Nous affirmons le féminisme comme instrument de construction de l’égalité, la liberté pour les femmes de disposer de leur corps, une sexualité et le droit à une vie libérée de la violence. De même nous réaffirmons l’urgence de la redistribution des richesses et des revenus, du combat contre le racisme et contre l’ethnocide, de la garantie du droit à la terre et au territoire, du droit à la ville, à l’environnement et à l’eau, à l’éducation, à la culture, à la liberté d’expression et à la démocratisation des moyens de communication.

Le renforcement des économies locales diversifiées et des droits territoriaux garantissent la construction collective d’économies plus dynamiques. Ces économies locales permettent des modes de vie locaux et soutenables, la solidarité communautaire, composante vitale de la résilience des écosystèmes. La diversité de la nature et sa diversité culturelle associée est le fondement d’un nouveau paradigme de société.

Les peuples veulent déterminer pour quoi et pour qui sont destinés les biens communs et énergétiques, en plus d’assumer le contrôle populaire et démocratique de sa production. Un nouveau modèle énergétique est fondé sur des énergies renouvelables décentralisées et qui garantissent l’accès à l’énergie pour la population et non pour les entreprises.

La transformation sociale exige des convergences d’actions, articulations et agendas à partir des résistances et alternatives contre-hégémoniques au système capitaliste qui sont en cours aux quatre coins de la planète. Les processus sociaux accumulés par les organisations et les mouvements sociaux qui ont convergé au Sommet des Peuples ont résulté sur le choix des axes de lutte suivants :

  • Contre la militarisation des Etats et des territoires;
  • Contre la criminalisation des organisations et mouvements sociaux;
  • Contra la violence envers les femmes;
  • Contre la violence envers les lesbiennes, gays, bissexuels, transsexuels et transgenres;
  • Contre les multinationales;
  • Contre l’imposition du paiement de dettes économiques injustes et pour l’audit citoyen de celles-ci;
  • Pour la garantie du droit des peuples à la terre et aux territoires urbains et ruraux;
  • Pour la consultation et le consentement libre préalable et informé, fondé sur les principes de la bonne foi et des effets qui en découlent, conformément à la Convention 169 de l’OIT;
  • Pour la souveraineté alimentaire et une alimentation saine, contre les produits agro-toxiques et transgéniques;
  • Pour la garantie et la conquête de droits;
  • Pour la solidarité avec les peuples et les pays, principalement ceux qui sont menacés par des coups d’Etat militaires ou institutionnels, comme cela s’est produit récemment au Paraguay;
  • Pour la souveraineté des peuples sur le contrôle des biens communs, contre les tentatives de marchandisations de ceux-ci;
  • Pour le changement de la matrice et du modèle énergétique en vigueur;
  • Pour la démocratisation des moyens de communication;
  • Pour la reconnaissance de la dette historique sociale et écologique;
  • Pour l’établissement d’une journée mondiale de la grève générale;

Nous rentrons dans nos territoires, régions et pays, animés par la volonté de construire les convergences nécessaires, de poursuivre la lutte, en résistant et en avançant contre le système capitaliste et ses anciennes et nouvelles formes de reproduction.

Levons-nous et poursuivons la lutte!

Rio de Janeiro, du 15 au 22 juin 2012

L’idée du Bon Vivre face aux défis du sous-développement: Dilemmes

20 Juil

Par Fidel Pérez Flores

Dans le cadre de la Conférence Rio + 20, la voix de quelques gouvernements latino-américains attire l’attention. Leur approche clairement plus dénonciatrice des rapports directs qui existent entre les mécanismes de développement capitalistes et le constat actuel d’une forte dégradation des conditions environnementales intrigue tout en offrant une véritable alternative. Ainsi les gouvernements Boliviens et Équatoriens accompagnent leur critique du système économique d’une vision qui place l’impact des activités humaines sur la nature au premier plan et proposent l’adoption d’un système fondée sur le paradigme du Bon Vivre, qui privilegie les droits de la nature et l’harmonisation complète de l’être humain avec les écosystèmes. A la différence de ce qui s’était produit lors de la première Conférence de Rio en 1992, la présence de ces voix introduit enfin un véritable débat et offre une confrontation claire sur les questions environnementales, les solutions proposées par le concept d’économie verte et les défis concernant la pauvreté. En conséquence, il est aujourd’hui nécessaire de prêter attention aux difficultés que le paradigme du Bon Vivre rencontre lorsqu’il s’agit de passer à l’action avec des politiques publiques concrètes. En effet, appliquer le principe des droits de la nature entraine l’apparition d’un certain nombre de contradictions, particulièrement dans des pays qui accumulent les fléaux du sous-développement et dont l’économie dépend fortement de l’exploitation de ressources naturelles exportables et non renouvelables.

Lors des discussions préparatoires pour la Conférence Rio+20, les représentants de la Bolivie et de l’Équateur ont questionné haut et fort la continuité d’un idéal de croissance fondé sur les relations capitalistes de production et une conception de la richesse centrée sur la capacité à consommer et acquérir la plus grand quantité de services et produits matériels[1]. Ils opposent à ce modèle une conception de vie basée sur le lien social et une harmonie avec la nature et les écosystèmes pratiquée depuis des siècles  par leurs peuples autochtones : le Bon Vivre. Cette approche reconnait que la croissance économique comporte des limites pour une nature dans laquelle les êtres humains doivent pourtant apprendre à vivre. Le progrès matériel de l’humanité ne peut indéfiniment continuer sans que cela n’implique des pertes catastrophiques pour l’environement. La participation des délégations équatoriennes et boliviennes à la Conférence Rio + 20 s’est donc fondée sur ces principes inscrits dans leurs  constitutions respectives. Il serait essentiel qu’une attention particulière soit portée à leur propos car leur expérience et leurs questionnements peuvent énormément contribuer à la nécessité de trouver un compromis sérieux pour le développement durable de la part des économies les plus riches, et donc polluantes, de la planète.

Cependant, il ne s’agit pas de tomber dans l’idéalisme ou la propagande, il est donc essentiel de présenter également les difficultés et les contradictions que les principes généraux du Bon Vivre rencontrent dans la vie politique interne de ces pays lors du passage à l’action concrète. C’est avec cet objectif en tête que Jessica Camille et Elizabeth Cooper, dans leur article intitulé Evo Morales, Climate Change, and the Paradoxes of a Social-Movement Presidency[2], nous offrent une véritable fenêtre d’observation de l’intérieur de la Bolivie où le gouvernement Morales rencontre régulièrement des difficultés à maintenir une véritable cohérence entre ce qu’il proclame dans les forums internationaux et les choix politiques pris « à la maison ». Ainsi des projets de développement d’infrastructures et d’exploitation des ressources naturelles considérées par le gouvernement bolivien comme indispensables pour l’économie nationale sont contestés par des acteurs sociaux qui dénoncent eux une véritable contradiction entre ces projets (et leurs impacts) et les principes même du respect des droits de la nature. En effet, ainsi que l’affirme Pablo Stefanoni[3], le désir de changement vers le modèle du Bon Vivre amène des contradictions importantes avec la nécessité de surmonter les conditions de précarité extrême qui sont le quotidien d’une bonne partie de la population bolivienne.

Pour le vice-président bolivien, Álvaro García Linera, il s’agit d’une des « contradictions créatives »[4]  dans lesquelles se trouve le procès politique bolivien actuel. Différentes conceptions et projets d’avenir s’y affrontent, chacun défendu par l’un des divers soutiens « sociaux » du gouvernement Morales, suscitant de nombreux dilemmes et la mise en œuvre de solutions complexes. Par exemple, en ce qui concerne la défense des droits de la « mère Terre », l’une des idées fortes du discours des pays tels que la Bolivie et l’Équateur à la Conférence Rio+20, sa stricte application s’avère incompatible avec l’un des projets phares du gouvernement bolivien, à savoir le développement industriel du pays pour en finir avec la logique d’exploitation des richesses nationales au bénéfice de compagnies étrangères qui contribuent peu à la création d’un dynamisme économique interne. D’après Linera, il faut continuer d’avancer sur ce projet d’industrialisation tout en faisant attention à n’intervenir que modérément sur l’environnement. Toutefois Cela reste clairement une question non résolue dans l’arène politique bolivienne.

Du côté du gouvernement équatorien, des initiatives, présentées par leurs auteurs comme des efforts concrets pour affronter les défis du sous-développement sans pour autant abandonner les préoccupations du « Bon Vivre » existent :

  • le projet « Yasuni-ITT », qui refuse d’exploiter 20% de ses réserves pétrolifères en échange de ressources provenant des fonds internationaux pour financer des programmes de développement ;
  • « les calculs des Émissions Liquides Évitées », mécanisme qui identifie les émissions non faites par les pays en développement en vue d’obtenir une compensation économique;
  • la mise en valeur du concept de « trace écologique »,voie de création d’indicateurs sur les coûts que le développement a sur l’environnement.

Lancées sur les tables de discussions auprès des gouvernements comme de la société civile lors de la Conférence Rio + 20, ces initiatives méritent une discussion sérieuse si l’on veut commencer à faire de la défense des droits de la « mère Terre » une question plus pratique que rhétorique.


[1] Pour une exposition plus approfondie des positionnements des pays sud-américains voir Fidel Pérez Flores et Regina Kfuri. Os governos sul-americanos frente ao tema ambiental: iniciativas e articulações regionais rumo à conferência Rio + 20. In: Observador Online, v.6, n.07, juillet 2011. http://observatorio.iesp.uerj.br/images/pdf/observador/observador_v_6_n_7_2011.pdf

[2] Jessica Camille et Elizabeth Cooper. Evo Morales, Climate Change, and the Paradoxes of a Social-Movement Presidency. In: Latin American Perspectives 173, v. 37 No. 4, juillet 2010, pp. 238-244

[3] Pablo Stefanoni. ¿Y quién no querría “vivir bien”? Encrucijadas del proceso de cambio boliviano. InÉ Crítica y Emancipación, n.7, pp 9-25, premier semestre de 2012.

[4] Voir Fidel Pérez Flores. Bolivia: gobernar hacia la izquierda entre contradicciones creativas. In: Red Seca: Revista de actualidad política, social y cultural. 2 avril 2012. http://www.redseca.cl/?p=2808

Quel travail pour demain ?

18 Juil

Ca y est ! Les paroles récoltées par la délégation lors du porteur de parole du 18 juin au Sommet des Peuples sont disponibles !

Les participants du Sommet des Peuples ont répondu à la question suivante :
– Quel travail pour demain ?

Découvrez les réponses récoltées :

Découvrez le nuage de mot correspondant !

Immersion à Rio+20 : une société civile exclue

17 Juil

Un article signé Suhayla Khalil

Et voilà, c’est fini! Malgré l’intense préparation des délégations de la société civile et des gouvernements des différents pays du monde, la Conférence des Nations Unies sur le développement durable Rio+20 se termine dans une ambiance incertaine sur le futur que nous voulons.

Notre expérience sur le terrain en tant que partie intégrante de la société civile accréditée nous a permis d’avoir un regard plus critique sur le processus des négociations  des conférences de l’ONU. En effet, à Rio nous avons assisté à un processus de négociation fermé, conduit par des délégations diplomatiques et auquel la société civile n’a eu aucun accès. Cette dernière s’est retrouvée en marge de la discussion principale ; le Sommet des Peuples, organisé par les représentants de la société civile brésilienne, a eu lieu au parc de Flamengo, à 1h au moins en bus de la Conférence officielle qui était elle-même très excentrée du centre de Rio de Janeiro et peu accessible. Même s’il faut reconnaître que certaines activités dédiées à la société civile, telle que les « Dialogues » ou les « Side events », ont été organisées à Rio Centro (lieu qui accueillait la Conférence officielle), ces initiatives sont restées déconnectées des négociations et n’ont pas produit de propositions intégrées dans le texte final. Cette exclusion a généré un sentiment de frustration croissant et généralisé parmi les divers acteurs de la société civile présents.

Plusieurs autres facteurs ont contribué à accroitre cette insatisfaction sur place. Premièrement et contrairement aux autres événements de cette ampleur organisés par l’ONU, les journalistes n’ont pas accédé aux pavillons des délégations officielles ce qui a rendu la diffusion des informations difficile. Ensuite, de nombreux chefs d’état, comme Barack Obama et Angela Merkel ne se sont pas déplacés pour participer aux négociations, ce qui a fragilisé politiquement la conférence. Troisièmement, les négociations ont été achevées par les négociateurs et le texte final rédigé avant même que les chefs d’États n’arrivent à Rio. Le texte final n’a recueilli qu’un consensus de 30% entre les Etats, ce qui a engendré la disparition d’un nombre important de paragraphes essentiels. On découvre ainsi des Etats de moins en moins enclins à la négociation et au compromis, des Etats qui se concentrent sur les intérêts nationaux et qui restent toujours très influencés par les intérêts de leurs grandes entreprises, « la crise n’aidant pas ».

Dans un tel scénario, nous avons  l’obligation de réfléchir au futur que nous voulons. Mais avant et pour que ce futur soit réalisable, il faut inévitablement réviser les règles du jeu international. Cela signifie démocratiser le processus de décision dans les institutions internationales, en garantissant la vraie participation de la société civile  à travers des canaux de participation réels. Il faut notamment soutenir une plus grande présence des représentants de la société civile des pays en développement. Enfin, il semble important de garantir la transparence des négociations, avec un plus grand accès de la presse d’information aux salles des délégations officielles.  Ce qui se passe en réalité, c’est que nous laissons  des équipes de technocrates et des gouvernements qui semblent uniquement sensibles aux appels des grandes entreprises continuer à définir seuls, et sans nécessité de rendre compte de leur décisions, l’avenir « que nous voulons ».


Le billet d’humour du matin

17 Juil

Parce qu’il faut bien parfois rire de certaines choses… Voici donc une petite sélection de dessins humoristiques sur Rio+20

Un dessin de Boré, disponible sur son blog

Un dessin signé Ganan, disponible sur son blog

Un dessin politique signé Rhodo

Une vision gonflée de Wimgz

Finalement, où en sommes-nous? Où allons-nous?

16 Juil

Un article signé , de l’

Finalement, où en sommes-nous, où allons-nous, comment imaginons-nous notre destin commun dans une relation intime avec la nature ? Comment construire les conditions du bien-vivre et du bonheur pour tous les êtres humains, sans distinction, en prenant soin et en partageant cette généreuse Planète qui nous accueille ? Quels sont les changements que nous devons opérer dès maintenant dans notre mode actuel d’organisation, de production et de consommation, de génération d’exclusions et d’inégalités sociales honteuses, de destruction de la base même de la vie ? Voilà les questions qui s’imposent alors que la Conférence Rio+20 se termine et qu’une fois de plus nos dirigeants ont montré leur manque de détermination à initier la grande reconstruction d’un monde en crise. Le tout en grande pompe pour rien, semant encore plus d’incertitude sur notre capacité collective à changer de cap pour une soutenabilité de la vie et de toutes les formes de vie, et pour l’intégrité de la Planète Terre. Pendant ce temps, la crise s’aggrave et s’amplifie, et l’incertitude collective augmente. Rio+20 alimente la capacité destructrice de la crise mondiale au lieu de profiter du moment historique et de transformer une structure de changements inajournable

Il nous faut affirmer haut et fort que la crise à multiples facettes (climatique et environnementale, financière, alimentaire, des valeurs…) et qui touche le monde entier, a également une autre composante : la crise de la gouvernance. Cela se manifeste d’un côté par le manque d’une structure de pouvoir mondial plus légitime que celle qui existe aujourd’hui. Le multilatéralisme s’épuise et se montre impuissant face à la menace permanente des impérialismes armés et de leur pouvoir de véto. Qui plus est, il vient buter contre les Etats-Unis et leurs vieilles souverainetés nationales. Dans ce bilan raccourci, il est fondamental d’ajouter que l’économie aujourd’hui globalisée et la santé même des finances publiques de l’État dépendent de l’énorme pouvoir privé des grandes corporations économico-financières, qui assujettissent le monde à leur volonté d’accumulation. Nous disposons d’avantage d’un gouvernement mondial de corporations que d’États.

D’autre part, la crise de la gouvernance apparaît dans le manque total de vision et de volonté de changement des gouvernements, mais également des parlements qui les soutiennent, malgré la limitation et l’aspect contradictoire de l’espace politique dont ils disposent encore face à ce qu’on appelle le pouvoir des marchés. Bien qu’apparemment impossibles, les grandes actions de l’humanité ont toujours été pensées et rêvées d’abord, puis les conditions pour les mettre en oeuvre ont été créées. Au vu de l’horizon mondial actuel et de la très pathétique Conférence Rio+20, nous constatons que sur la grande scène mondiale des états, nous manquons de grandes figures politiques et éthiques, généreuses et engagées, capables d’écouter les voix et de capter les demandes d’une population planétaire naissante qui réclame des changements immédiats, des gouvernants capables de définir des caps et d‘établir des accords démocratiques pour instaurer des mécanismes de changements ici et maintenant.

Rappelons ici que d’une certaine façon, l’échec de Rio+20 était à prévoir. Mais nous avions cette lueur d’espoir que quelque chose pourrait se produire et que le dénouement pourrait être différent. Finalement, la politique et a fortiori la politique démocratique, est toujours imprévisible dans ses résultats, du moins quant aux délais et aux moyens d’y parvenir. Mais cette fois-ci, la diplomatie a misé sur le plus petit dénominateur commun, qui s’est avéré inférieur au minimum, inférieur à la Conférence Eco 92, et très inférieur au minimum demandé par l’opinion publique et les différentes voix citoyennes du monde.

Comme toujours, il y a quelque chose de positif à retenir de cette conférence vide : l’économie verte, vendue comme développement soutenable n’a pas obtenu de consensus et rien n’a été approuvé dans ce sens. Si les grandes corporations peuvent effectivement fêter l’incapacité collective du pouvoir en place à changer de cap dans l’organisation de l’économie du monde, elles ne peuvent célébrer aucun triomphe, dans le sens où on ne leur a pas donné la liberté d’assaillir les marchés sur un nouveau front sans aucune réglementation, qui touche la nature dans sa totalité, avec ses biotechnologies, nanotechnologies et géo-ingénieries.

Mais le combat n’est pas terminé. La grande absente de la Conférence de Rio+20, c’est la population planétaire naissante. Et pourtant, c’est d’elle que doivent surgir des mouvements de citoyenneté pour changer le cours de l’histoire. Nous avons essayé de nous préparer pour cet événement et nous étions en nombre raisonnable au Sommet des Peuples. Les participants au Sommet des Peuples et au Rio Centro n’ont pas été peu nombreux. Certains, comme toujours, ont exercé la diplomatie citoyenne et essayé de peser sur la rédaction du document final. Nous avons fait du bruit, beaucoup de bruit. Au Sommet des Peuples, nous avons surtout montré la vibrante et joyeuse diversité qui caractérise les peuples habitant la Planète Terre. Mais, il faut le reconnaître, il n’y a pas eu assez de participants et il nous a fallu de l’énergie pour créer une réelle densité politique démocratique capable d’inverser le jeu ou du moins de représenter une menace. Nous n’avons pas non plus réussi à surmonter notre fragmentation et le grondement qu’elle génère en nous et qui résonne vers l’extérieur. En termes de voie vers de nouveaux paradigmes, le slogan qui nous a unis, nous n’avons pas obtenu grand-chose. Nous avons montré de l’indignation, de la capacité à nous mobiliser, mais nous n’avons pas encore su manifester notre vision et les propositions faites de multiples et différents rêves, de nombreuses et diverses identités sociales et culturelles, de pluralisme de visions, d’analyse et de mode de fonctionnement. L’incapacité des gouvernements face à leurs contradictions et surtout, face au pouvoir des corporations, encore une fois très manifeste à cette Conférence de l’ONU, ne peut être surmontée que par notre détermination de citoyens et citoyennes responsables, qui croient et qui agissent pour que d’autres mondes puissent exister. Notre mission est de pousser les gouvernements au changement, assumons-la.

Article disponible sur le Portail Rio+20

Quels souvenirs nos enfants auront-ils de Rio + 20 ?

16 Juil

Souvenez vous, le 21 juin, les jeunes de la délégation « La parole des jeunes à Rio + 20 » ont organisé un porteur de parole dans l’enceinte qui accueillait la Conférence de l’ONU Rio + 20. Ils ont abordé les participants de la conférence pour leur poser la question suivante :

What will our children remember of Rio + 20 ?  

Découvrez les propos reccueillis par les jeunes :

 

 Et voici le nuage de mots correspondant !

Rio+20… et après ? L’action continue

11 Juil

Rio+20 est terminé. Et ensuite ?

Retrouvez ci-dessous une tribune de François Loos, président de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), paru dans le journal Les Echos :

Copenhague, Durban… les aboutissements peu tangibles des conférences internationales dédiées à l’environnement ces dernières années ont nourri un scepticisme croissant sur la capacité des pays à se mobiliser pour un développement durable mondial. Et les bilans environnementaux dressés la semaine dernière lors du sommet de la Terre Rio + 20 n’ont fait que renforcer ce pessimisme ambiant.

A Rio, en 2012, l’Europe était aux avant-postes pour adopter une déclaration mondiale – « L’avenir que nous voulons » -avec la conviction que l’heure n’est plus aux intentions, mais à l’action. Les marges de manoeuvre sont là. Il s’agit de les activer, avec une volonté commune d’amélioration continue. Ici et ailleurs, du global au local, des solutions se mettent en place. Il convient de partager les expériences concluantes et d’assurer un vrai transfert de savoir-faire entre tous. Nous sommes allés à Rio pour montrer que l’on agit et comment l’on agit.

Rio + 20 est une étape. Avant, pendant et après les négociations des Etats lors du premier sommet de la Terre, la société civile est demeurée fortement mobilisée. Il doit en être de même à l’issue de ce sommet. Collectivités, entreprises, syndicats, associations, particuliers, nous devons rester actifs. Ne laissons pas la crise économique freiner nos efforts. L’économie verte fait partie intégrante de l’économie et ne peut plus être circonscrite au seul domaine de la responsabilité sociale et environnementale. Elle est porteuse d’emploi et de développement au Nord comme au Sud.

Il est nécessaire de transformer notre modèle de production et de consommation, comme notre modèle urbain. Le modèle unique de la ville doit être banni. La ville durable sera celle qui réussira à s’organiser harmonieusement en fonction de son environnement, des évolutions démographiques, des mutations sociales, des facteurs culturels de ses habitants… La ville durable sera pensée de manière globale et fluide. Air, énergie, déchets, bruit… les territoires doivent se mobiliser sur tous les fronts pour répondre aux enjeux du développement durable.

Chacun peut agir, individuellement comme à l’échelle de l’entreprise ou de la collectivité. Les solutions concrètes existent déjà. De nombreuses expériences françaises le démontrent. Nous redoublons d’efforts pour donner les moyens aux acteurs locaux de passer à l’action. Les démarches exemplaires se diffusent sur notre territoire. Il faut à présent les démultiplier – en France, et partout ailleurs. Il faut éclairer par l’exemple. C’est ce que nous avons fait à Rio. Les réponses sont sur le terrain.

La France agit déjà : les bâtiments basse consommation et à énergie positive se multiplient, 133 hectares de zones urbaines sont en passe d’être réhabilités, 500 territoires sont en marche pour la mise en place de plans climat-énergie territoriaux, près de 1.300 points noirs bruits sont gérés, 3.452 actions de réduction des déchets ont été mises en œuvre en 2011, 26 projets ont été sélectionnés l’an dernier dans le cadre des investissements d’avenir pour déployer des innovations environnementales… et il faut poursuivre.

Montrer que des changements s’opèrent, rassembler toutes les énergies et apprendre ensemble, ce sont les « indispensables » pour appréhender les vingt prochaines années avec des perspectives durables. Nous sommes allés à Rio avec cette volonté, pour en faire le sommet des actions possibles. Les résultats de Rio ne sont pas contraignants, mais ils ne nous empêchent pas d’aller de l’avant.

« Un vrai défi »

10 Juil

Retrouvez ci-dessous l’interview de Lina Buscail pour le numéro d’août-septembre du journal de la Ligue de l’enseignement, Les idées en mouvement !

Lina Buscail, 25 ans, partie avec la délégation « la parole des jeunes à Rio + 20 », est revenue avec un petit sentiment d’inachevé. Toutefois, elle se réjouit de l’effervescence qui a animé le forum alternatif de la conférence : le Sommet des Peuples.

Les Idées en mouvement : Pourquoi avoir choisi d’intégrer cette délégation de jeunes ?

Lina Buscail : Adhérente à la Ligue de l’enseignement, j’ai récemment contribué à la mise en place au sein de la fédération du Var d’un Agenda 21 et d’Agendas scolaires. De plus, ma formation en écologie et en sciences de l’environnement font que je suis d’emblée sensible aux problématiques du développement durable.

Un rendez-vous tel que le Sommet de la Terre est un véritable enjeu selon moi, écologique bien sûr, mais également politique et social. Les défis à relever sont grands. Personnellement, je milite pour développer un pôle international de recherche et de développement sur les énergies renouvelables. Je suis en outre favorable à la création d’un tribunal international sur l’environnement. En effet, aujourd’hui, ça n’a vraiment pas de sens de nier les conséquences de l’activité humaine sur l’écosystème.

Pouvez-vous nous présenter la délégation ?

Les jeunes avaient des parcours vraiment différents. Certains travaillaient déjà sur la question du développement durable ou disposaient de solides compétences, tandis que d’autres connaissaient simplement le concept. J’ai trouvé cette mixité salutaire. La diversité a rendu la délégation très riche humainement. Qu’importe le profil de chacun, la motivation était bien présente : elle pouvait être personnelle, professionnelle mais elle était avant tout citoyenne.

Comment s’est déroulé votre séjour et surtout êtes-vous parvenus à porter vos 15 propositions ?

Pour nous approprier le Sommet des Peuples, il nous a fallu un peu de temps. Concernant la participation de chacun aux différents travaux, nous avons choisi de nous répartir en petits groupes pour recueillir un maximum d’informations, réaliser des interviews et rendre compte des 15 propositions que nous portions au nom des jeunes (1).

Vous avez notamment organisé un débat international sur le thème « crise économique : l’importance des valeurs du développement durable dans les choix de carrière personnels ». Qu’en avez-vous retiré ?

Pour animer ce débat, nous avons fait appel à des techniques participatives. Ce qui a très bien fonctionné puisque les scolaires que nous avions sollicités ont eux-mêmes invité une autre classe rencontrée par hasard, si bien que ce sont près de 80 personnes qui ont assisté au débat  ! J’ai ressenti une réelle envie de participer, autant de la part des enfants que des jeunes. Chacun semblait attentif et concerné par la problématique proposée. Ce qui me laisse penser que la société civile était bien là pour créer du lien, échanger et avancer des propositions en vue d’améliorer les conditions de vie et de travail dans le monde. Les valeurs à défendre semblaient partagées par tous : Brésiliens, Français comme Américains. Et même si les négociations officielles n’ont pas abouti, le débat a constitué pour moi une expérience extrêmement positive.

Justement, de nombreuses organisations de la société civile ont dénoncé l’adoption d’un texte sans vision ni ambition pour « le futur que nous voulons ».

Malgré le fiasco annoncé, avant même la tenue de la conférence il me semble qu’il y avait – et qu’il y a encore aujourd’hui – un vrai enjeu quant à la place laissée à la société civile. Le sommet officiel ne se trouvait qu’à une heure du Sommet des Peuples qui, lui, regorgeait d’idées et de propositions réfléchies, issues des populations du monde entier. Dans quelle mesure les gouvernements ont-ils su les écouter et s’en inspirer  ? Pensant d’abord à leurs propres intérêts, les gouvernements sont restés englués dans une sorte d’inertie. Voilà notre principale déception.

Globalement, que retenez-vous de cette expérience citoyenne ?

Comprendre le mécanisme et la logique des décisions prises à un niveau international s’est révélé très enrichissant. Nous avons vécu de belles rencontres, des échanges intéressants. Quant aux intervenants, ils étaient bien plus impliqués et acharnés que je ne l’aurais cru  !

Toutefois, compte tenu des enjeux actuels liés au climat, j’ai trouvé choquant que certaines grandes nations ne soient pas représentées. Cela me semble assez grave, ne serait-ce que symboliquement. Et ne parlons pas de l’empreinte carbone du Sommet officiel, avec son immense complexe isolé, lumineux et énergivore.

Cependant, je pense que chaque temps de rencontre mondial, même s’il est compliqué et coûteux à organiser, a son importance. Renforcer la communication entre les différents États mais aussi entre la société civile et les gouvernements est toujours utile. Et les engagements tant espérés doivent bien être initiés et discutés pour être adoptés ensuite. D’ailleurs, la conférence mondiale sur le climat de 2015 à Durban semble de ce point de vue assez prometteuse.

Concernant la délégation, on peut dire qu’un groupe a véritablement vu le jour, et la séparation s’est du reste révélée difficile. Heureusement, les moyens de communication ne manquent pas et nous avons déjà prévu de nous revoir pour mettre en forme nos idées et proposer un après-Rio + 20 que la Ligue de l’enseignement pourra se réapproprier.

(1) Les 15 propositions sont le fruit de réflexions menées par des jeunes dans le cadre de débats organisés par la Ligue de l’enseignement, dans les régions et au niveau national en amont du Sommet de la Terre.

Propos recueillis par Laurianne Condette

Rio+20 : un autre visage

10 Juil

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