Un article signé Suhayla Khalil
Et voilà, c’est fini! Malgré l’intense préparation des délégations de la société civile et des gouvernements des différents pays du monde, la Conférence des Nations Unies sur le développement durable Rio+20 se termine dans une ambiance incertaine sur le futur que nous voulons.
Notre expérience sur le terrain en tant que partie intégrante de la société civile accréditée nous a permis d’avoir un regard plus critique sur le processus des négociations des conférences de l’ONU. En effet, à Rio nous avons assisté à un processus de négociation fermé, conduit par des délégations diplomatiques et auquel la société civile n’a eu aucun accès. Cette dernière s’est retrouvée en marge de la discussion principale ; le Sommet des Peuples, organisé par les représentants de la société civile brésilienne, a eu lieu au parc de Flamengo, à 1h au moins en bus de la Conférence officielle qui était elle-même très excentrée du centre de Rio de Janeiro et peu accessible. Même s’il faut reconnaître que certaines activités dédiées à la société civile, telle que les « Dialogues » ou les « Side events », ont été organisées à Rio Centro (lieu qui accueillait la Conférence officielle), ces initiatives sont restées déconnectées des négociations et n’ont pas produit de propositions intégrées dans le texte final. Cette exclusion a généré un sentiment de frustration croissant et généralisé parmi les divers acteurs de la société civile présents.
Plusieurs autres facteurs ont contribué à accroitre cette insatisfaction sur place. Premièrement et contrairement aux autres événements de cette ampleur organisés par l’ONU, les journalistes n’ont pas accédé aux pavillons des délégations officielles ce qui a rendu la diffusion des informations difficile. Ensuite, de nombreux chefs d’état, comme Barack Obama et Angela Merkel ne se sont pas déplacés pour participer aux négociations, ce qui a fragilisé politiquement la conférence. Troisièmement, les négociations ont été achevées par les négociateurs et le texte final rédigé avant même que les chefs d’États n’arrivent à Rio. Le texte final n’a recueilli qu’un consensus de 30% entre les Etats, ce qui a engendré la disparition d’un nombre important de paragraphes essentiels. On découvre ainsi des Etats de moins en moins enclins à la négociation et au compromis, des Etats qui se concentrent sur les intérêts nationaux et qui restent toujours très influencés par les intérêts de leurs grandes entreprises, « la crise n’aidant pas ».
Dans un tel scénario, nous avons l’obligation de réfléchir au futur que nous voulons. Mais avant et pour que ce futur soit réalisable, il faut inévitablement réviser les règles du jeu international. Cela signifie démocratiser le processus de décision dans les institutions internationales, en garantissant la vraie participation de la société civile à travers des canaux de participation réels. Il faut notamment soutenir une plus grande présence des représentants de la société civile des pays en développement. Enfin, il semble important de garantir la transparence des négociations, avec un plus grand accès de la presse d’information aux salles des délégations officielles. Ce qui se passe en réalité, c’est que nous laissons des équipes de technocrates et des gouvernements qui semblent uniquement sensibles aux appels des grandes entreprises continuer à définir seuls, et sans nécessité de rendre compte de leur décisions, l’avenir « que nous voulons ».